Les soupirs d’une âme exilée

Sur ces paroles de saint Paul : Cupio dissolvi et esse cum Christo

Je vis, mais c’est hors de moi-même ;
Je vis, mais c’est sans vivre en moi ;
Je vis dans l’objet de ma foi
Que je ne vois pas et que j’aime ;
Triste nuit des longs embarras
Où mon âme est enveloppée,
Si tu n’es bientôt dissipée,
Je me meurs de ne mourir pas.

Le noeud de flamme et de lumière
Qui lie à Dieu seul mon amour
Fait par un amoureux détour
Qu’il est captif, et moi geôlière ;
À voir qu’en de faibles appas
Il trouve une prison si forte,
Un si grand zèle me transporte
Que je meurs de ne mourir pas.

Bon Dieu, que longue est cette vie !
Fâcheux exil qui me détiens,
Que ta prison et tes liens
Pèsent à mon âme asservie !
L’espoir d’être libre au trépas
Me cause tant d’impatience
Qu’attendant cette délivrance
Je me meurs de ne mourir pas. […]

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