Comme à travers un triple et magique bandeau,
– Ô nuit ! ô solitude ! ô silence ! – mon âme
A travers vous, ce soir, près du foyer sans flamme,
Regarde par delà les portes du tombeau.

Ce soir, plein de l’horreur d’un vaincu qu’on assaille,
Je sens les morts chéris surgir autour de moi.
Leurs yeux, comme pour lire au fond de mon effroi,
Luisent distinctement dans l’ombre qui tressaille.

Derrière moi, ce soir, quelqu’un est là, tout près.
Je sais qu’il me regarde, et je sens qu’il me frôle.
Quelle angoisse ! Il est là, derrière mon épaule.
Si je me retournais, à coup sûr je mourrais !

Du fond d’une autre vie, une voix très lointaine
Ce soir a dit mon nom, ô terreur ! Et ce bruit
Que j’écoute – ô silence ! ô solitude ! ô nuit ! –
Semble être né jadis, avec la race humaine !

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