Un soir, au temps du sombre équinoxe d’automne

Un soir, au temps du sombre équinoxe d’automne
Où la mer forcenée et redoublant d’assauts
Se cambre et bat d’un lourd bélier le roc qui tonne,
Nous étions dans un lieu qui domine les eaux.

Heure trouble, entre l’ombre et le jour indécise !
La faux du vent sifflait dans les joncs épineux.
A mes pieds, sur la terre humide et nue assise
Tu frissonnais devant l’horreur du ciel haineux.

Inattentive aux cris des stridentes mouettes,
Tu regardais la nuit de pente en pente errer ;
Des pleurs brûlaient tes yeux et tes lèvres muettes,
Et l’embrun te glaçait sans te désaltérer.

Et moi, sur ce rocher dont l’eau sculpte la proue,
Debout comme à l’avant d’un vaisseau de granit,
J’écoutais l’escadron des vagues qui s’ébroue
Et terrible, et ruant dans les récifs, hennit.

Ô bien-aimée ! ô plainte à mes pieds répandue !
Heure farouche où tout en moi désespérait,
Où toute ma pensée, affreusement tendue,
Luttait pour arracher au Destin son secret !

A l’Occident, au fond d’un porche de nuées,
Le soleil soucieux s’échancrait sur les flots ;
A mon cou, par tes mains étroitement nouées,
Tu suspendais ton corps secoué de sanglots ;

Et, sentant entre nous l’étendue infinie
Qui sépare du ciel l’esprit contemplateur,
Nous regardions le feu de l’astre en agonie
Dans les mers du couchant descendre avec lenteur.

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