Chant sur la naissance de Jean, second fils de l’auteur

Mon petit fils, qui n’as encor rien vu,
A ce matin ton père te salue ;
Viens-t’en, viens voir ce monde bien pourvu
D’honneurs et biens qui sont de grant value ;
Viens voir la paix en
France descendue, Viens voir
François, notre roi et le tien,
Qui a la France ornée et défendue ;
Viens voir le monde où y a tant de bien.

Viens voir le monde, où y a tant de maux ;
Viens voir ton père en procès qui le mène ;
Viens voir ta mère en de plus grands travaux
Que quand son sein te portait à grand’peine ;
Viens voir ta mère, à qui n’as laissé veine
En bon repos ; viens voir ton père aussi,
Qui a passé sa jeunesse soudaine,
Et à trente ans est en peine et souci.
Jean, petit Jean, viens voir ce tant beau monde,
Ce ciel d’azur, ces étoiles luisantes,
Ce soleil d’or, cette grand terre ronde,
Cette ample mer, ces rivières bruyantes,
Ce bel air vague et ces nues courantes,
Ces beaux oiseaux qui chantent à plaisir,
Ces poissons frais et ces bêtes paissantes ;
Viens voir le tout à souhait et désir.

Viens voir le tout sans désir et souhait ;
Viens voir le monde en divers troublements ;
Viens voir le ciel qui notre terre hait ;
Viens voir le combat entre les éléments ;
Viens voir l’air plein de rudes soufflements,
De dure grêle et d’horribles tonnerres ;
Viens voir la terre en peine et tremblements ;
Viens voir la mer noyant villes et terres.

Enfant petit, petit et bel enfant,
Mâle bien fait, chef-d’oeuvre de ton père,
Enfant petit, en beauté triomphant,
La grand’liesse et joie de ta mère,

Le ris, l’ébat de ma jeune commère
Et de ton père aussi, certainement,
Le grand espoir, et l’attente prospère,
Tu sois venu au monde heureusement.

Petit enfant, peux-tu le bien venu
Être sur terre, où tu n’apportes rien,
Mais où tu viens comme un petit ver nu ?
Tu n’as de drap, ne linge qui soit tien,
Or ni argent, n’aucun bien terrien ;
A père et mère apportes seulement
Peine et souci, et voilà tout ton bien.
Petit enfant, tu viens bien pauvrement !

De ton honneur ne veuil plus être chiche,
Petit enfant de grand bien jouissant,
Tu viens au monde aussi grand, aussi riche
Comme le roi, et aussi florissant.
Ton héritage est le ciel splendissant ;
Tes serviteurs sont les anges sans vice ;
Ton trésorier, c’est le Dieu tout-puissant
Grâce divine est ta mère nourrice.

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